Une autre politique est possible !

Le printemps des luttes a commencé et nous pouvons en être fiers ! Entre 3000 et 5000 personnes ont participé à la manifestation de Nice du jeudi 09 avril 2015 à l’appel des organisations syndicales CGT, FO, FSU, Solidaires, contre la loi Macron et les politiques d’austérité.

Personnel hospitalier, professeurs, salariés du public et du privé, chômeurs, retraités mais aussi étudiants se sont largement mobilisés et ont permis de faire converger l’ensemble des luttes sociales.

Mauvaises conditions de travail, chômage, licenciement, précarité, discriminations… les revendications sont nombreuses et la mobilisation doit se poursuivre.

Les militants du Parti de Gauche des Alpes-Maritimes se sont déplacés en nombre afin de soutenir les revendications de cette manifestation et rappeler au gouvernement de changer immédiatement LA politique qu’il mène en faveur des actionnaires et du patronat.

 

Ce sont ces politiques d’austérité qui, partout en Europe, favorisent le chômage, la précarité et la pauvreté ! Le gouvernement n’a donc rien compris, il décide sans nous mais surtout contre nous ! Il n’hésite pas à exploiter tous les rouages antidémocratiques de la 5ème République comme l’utilisation du 49.3 pour imposer sa politique antisociale et anti-écologique.

Plus que jamais, nous devons revendiquer une 6ème République réellement démocratique, sociale et écologique ainsi que la séparation du MEDEF et de l’Etat.

Prochainement, nous rencontrerons les salariés de Carrefour Market Gorbella qui se sont mis en grève afin de dénoncer des conditions de travail toujours plus difficiles.

Nous devons leur apporter un soutien sans faille ainsi qu’à l’ensemble des salariés en lutte du public comme du privé !

Une autre politique est possible. Partage des richesses et planification écologique pour relancer l’activité, interdiction des licenciements boursiers, droit de veto aux représentants des salariés dans les entreprises, réduction du temps de travail pour travailler tous…

L’alternative existe : pour vivre mieux demain, vite l’écosocialisme ! 

La ZEP de Ranguin la Bocca déménage à Nice… (!)

La décision de trop ?

En tout cas, ça chauffe drôlement à Cannes dans la ZEP de Ranguin La Bocca: Les parents d’élèves et les enseignants sont révoltés contre la décision qui vient d’être actée de dé-ZEPer « Pierre La Bocca » pour habiller « Paul Le Niçois » ! … Pourtant le Front de gauche Cannois avait alerté dès la campagne municipale, et même avant… (voici le dernier billet de la section FDG de Cannes: http://blog.pcfcannes.fr/2014/11/la-zep-de-ranguin-de-nouveau-en-danger/)

A quoi s’attendent-ils ? A ce que les pauvres s’amusent à jouer au jeu du plus pauvre pour obtenir les faveurs du prince… Car à ce jeu, ce sont bien les plus défavorisés qui sont mis en concurrence ! Si ces deux espaces sont concurrents car il remplissent les critères pour être des ZEP, alors que ces deux espaces soient mis en ZEP: ce n’est pas l’un ou l’autre… Nous n’avons pas à choisir quels enfants l’on va sacrifier. Fétichisme absurde ! car c’est ceux de Nice autant que ceux de Cannes qui doivent bénéficier du statut ZEP et de tous les moyens que la République doit à sa jeunesse.

Nous ne voulons pas de leur austérité et de leurs choix entre « des dents en bois et des jambes en mousse »!

Lundi à La Bocca, Citoyens, parents d’élèves, Enseignants, personnels des écoles, et tous les militants révoltés contre cette provocation à l’encontre des travailleurs les plus pauvres et les plus fragiles, sont appelés à manifester et bloquer les institutions à La Bocca. Les lieux et horaires de rassemblement vous seront communiqués dès que possible. Vous pouvez déjà préparer vos slogans que nous afficherons sur un Fil citoyen, des chaînes et des cadenas pour fermer les écoles et les services publics, toutes vos initiatives seront les bienvenues, ainsi que vos bras et vos drapeaux… LUNDI SERA ROUGE (et vert )

NB: Aux dernières nouvelles le maire de Cannes n’a toujours pas décidé d’emménager dans une barre de la frayère pour bénéficier de la douceur des lieux ! … à Cannes le taux de pauvreté est de 19% pour une moyenne nationale de 15%, cela est combiné et masqué par de très fortes inégalités de revenus et encore plus de patrimoines, et aggravé par un coût de la vie parmis les plus élevés: l’extrême pauvreté, y compris des travailleurs au services de ces « messieurs dames », côtoie l’extrême richesse…). De plus, la pauvreté y est fortement concentrée dans certains quartiers La Bocca Ranguin, République…Les bourgeois tiennent les collines et le bord de mer…
En effet, voila ce qu’en dit l’INSEE:

« …ainsi que le territoire prioritaire de La Bocca à Cannes. Dans certaines parties de ces territoires, plus de 25 % des ménages sont des parents isolés.À La Bocca à Cannes, près de 40 % des ménages vivent avec moins de 1 000 € par mois et par UC, soit environ 5 500 personnes. Dans ces espaces, les actions favorisant la garde des enfants et l’accès à l’emploi des parents isolés revêtent un enjeu majeur […]. » http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?reg_id=5&ref_id=17544

OZOG Jérémie, militant du COM’9

Réseau Salariat 06 . Bernard Friot

NOUS VOUS INVITONS à une série d’événements organisés par le Réseau Salariat 06 

les 10,11 et 12 octobre 2014 à Mouans-Sartoux, Grasse et Nice
autour de la venue du Sociologue et économiste Bernard FRIOT spécialiste des luttes pour l’émancipation du Salariat 
(Retraites, Sécurité sociale, Salaire à vie, ). 

Bernard Friot professeur émérite à l’université Paris-Ouest-Nanterre-La-Défense dont la thèse d’économie portait sur la construction de la Sécurité Sociale en France de 1920 à 1980, a développé ses recherches sur la sociologie du salariat et la comparaison des systèmes de protection sociale en Europe, ses travaux ont également porté sur les retraites.

A l’occasion de son dernier ouvrage «Emanciper le travail», Bernard Friot explique ce qui structure la lutte des classes : une lutte pour définir ce qui a valeur économique. «Ce nest ni d’une réforme fiscale ni d’une plus grande régulation étatique dont nous avons besoin, mais de plus de pouvoir populaire sur l’économie et sur le travail».  ( B.FRIOT « L’enjeu du salaire », 2012)

Il participe au groupe de recherche de l’Institut européen du salariat (38 chercheurs et doctorants dont Mathieu Grégoire et Christine Jackse), et est l’un des principaux animateurs de l’association d’éducation populaire Réseau Salariat*, qui promeut l’idée d’une «reconnaissance de chacun comme étant producteur de valeur par le biais d’un salaire à vie ».

*Le groupe local Réseau Salariat Alpes Maritimes (Coordination 06) est composé d’employés, de précaires, d’élus, d’anciens et d’actuels chefs d’entreprises, d’enseignants et de retraités, qui ont compris les enjeux révolutionnaires des subversions introduites en 1945 dans le salariat et ses institutions.

LE PROGRAMME

3 conférences Débat et 2 demi-journées d’Ateliers formation sur le thème du salaire socialisé, des cotisations et du travail.

  • Le Vendredi 10 octobre 2014 à MOUANS-SARTOUX :
    A la Salle de laquarium – Médiathèque – 201, avenue de la Gare – 06370 Mouans-Sartoux

De 18h30 à 20h30 : Conférence «Émanciper le Travail»

  • Le Samedi 11 Octobre 2014 à GRASSE
    A la Bourse du Travail – 11, rue Gazan – 06130 Grasse (stationnement gratuit le samedi dans les parkings)

 

A 10h00 : Café offert

De 10h30 à 13h00 : Conférence «L‘histoire révolutionnaire de la sécurité sociale»

De 13h00 à 15h00 : Apéro – Buffet (Tarif libre)

De 15h00 à 17h00 : Atelier-formation «Producteur ou consommateur : qui suis-je ?»

 

  • Le Dimanche 12 Octobre 2014 à NICE
    Au court-circuit Café – 4, rue Vernier – 06000 Nice

 De 11h00 à 14h00 : Brunch (discussion libre et informelle)

 De 14h00 à 17h00 : Atelier-formation «Précarité et intermittence : du plein emploi au plein salaire»

 De 19h00 à 21h00 : Conférence «Revenu ou Salaire: la base ou la vie?»

 21h00 : Repas convivial : BIO-Soupe au Pistou ( 7€ – !!! SUR RÉSERVATION avant le 09/10!!! – Tél : 06 16 91 15 22)
Entrée libre.

Faites circuler l »info dans vos réseaux ! 

Pour les contacts, les demandes d’informations, c’est ici :

Coordinateur du Réseau Salariat 06: reseausalariat06@gmail.com

Lien facebookhttps://www.facebook.com/reseausalariat06

Téléphone: 0609498747

 

 

Pour vous informer :

Site Réseau salariat : http://www.reseau-salariat.info

Vidéo : http://www.reseau-salariat.info/6a2aa40dce09799c0cadcbffcef31985?lang=fr

Par le réseau jeunes ou PG06. Mobilisons-nous pour le climat!

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Mobilisons-nous pour le climat!

Les dernières données publiées par les experts du GIEC confirment que les « efforts » actuels sont totalement insuffisants pour affronter le changement climatique qui s’accélère. Les prévisions sont catastrophiques : la hausse des températures atteindrait +2,5 à + 7,8° C selon les régions. La seule augmentation de 2,5°C aurait déjà des conséquences irréversibles !

Augmentation du niveau des océans, sécheresse, inondations, cyclones, biodiversité menacée, famines… c’est notre écosystème tout entier qui est en danger ! Pourtant il est le seul compatible avec la vie humaine !

Notre avenir est alarmant ! 

|   Le Parti de Gauche du 06 participera à la marche pour le climat organisée dimanche 21 Septembre à Nice. Rendez-vous donc dans le cortège du PG à partir de 14H00 à Rauba Capeu à Nice !    |

Tout cela est le résultat des logiques capitalistes, et est directement lié à notre mode de production destructeur. Tout est sujet à la course au profit contre les droits fondamentaux de se nourrir, se loger, s’éclairer ou se chauffer. Cette folie pousse à la guerre, famine, compétition et multiplie les catastrophes…

Pourtant, il existe des solutions ! Règle verte, protectionnisme solidaire, planification écologique … Nous devons drastiquement réduire notre utilisation des énergies fossiles (pétrole, gaz etc.) et nos émissions de gaz à effet de serre!

Il faut impulser une relance de l’activité responsable écologiquement et utile socialement, par le partage des richesses et la planification écologique permettant la transformation de la société à partir de grands projets comme la transition énergétique, la lutte contre la précarité énergétique et en eau, un plan national de transition écologique de l’agriculture (paysanne, locale et équitable), la relocalisation et l’aménagement du territoire (services publics de proximité, réindustrialisation…), la réorganisation des villes (écoconstructions, habitats participatifs, transports en commun…), le développement du progrès humain du Nord au Sud de la planète , la sortie du productivisme (bien vivre dans une société de qualité plutôt que dans la quantité).

Effet de serre et désordres climatiques, perte de biodiversité, raréfaction des ressources… L’alternative est possible, elle s’appelle l’écosocialisme et elle est notre seule chance de protéger le bien vivre des générations à venir.

Dimanche c’est la journée mondiale d’action pour le climat! Plus d’infos ici

http://legavroche06.com/2014/09/18/mobilisons-nous-pour-le-climat/

Atelier de lectures philosophique, à Nice le 03/10

Animé par Alexan Colmars (enseignant de Philosophie) et Claude Ferrucci (Enseignant en Sociologie) Tout deux du PG

Jérémie OZOG COM’9

« La lutte des intermittents est une leçon pour l’ensemble du salariat »

Pour consulter l’article directement sur le site du journal Regard: http://www.regards.fr/web/la-lutte-des-intermittents-est-une,7895

« La lutte des intermittents est une leçon pour l'ensemble du salariat (...) (cip-idf)

Sociologue, membre du Réseau Salariat (éducation populaire) et de l’Institut Européen du Salariat (recherche universitaire), Mathieu Grégoire est l’un des observateurs de l’importante mission officielle de concertation sur les intermittents qui a débuté en juillet dernier.

Ces discussions peuvent-elles déboucher sur l’invention de nouveaux droits pour les salariés ?

Regards. Le week-end dernier, vous avez été invité à l’Assemblée générale des coordinations des intermittents et précaires qui s’est tenue à Dijon. Dans quel état d’esprit sont les intermittents ?

Mathieu Grégoire. En 2003, le mouvement avait été beaucoup plus fort pendant l’été, mais il s’était vite essoufflé ensuite. Il me semble que l’objectif de maintien d’une mobilisation sur la durée est atteint.

Les intermittents ne cessent de dire que ce n’est pas leur régime qu’ils défendent, mais l’augmentation en flèche de la précarité qu’ils souhaitent voir endiguer. Cela semble bien ambitieux…

La marque de ce mouvement est bien là : ce que les intermittents défendent, ils le défendent pour tous. Il faut regarder de près ce qu’ils entendent par « pour tous ». Entre 1996 et aujourd’hui, le nombre de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi en activité réduite, ceux qui cumulent emplois et chômage, est passé de 500.000 à 1,7 million. L’arrivée de ces « intermittents hors spectacles » a pris une ampleur nouvelle. Sur la même période, le nombre de chômeurs qui ne travaillent pas du tout est resté dans l’étiage des 3 millions. Toutes catégories confondues, ce sont donc plus de cinq millions de chômeurs qui sont inscrits à Pôle emploi. Et nous savons qu’il y a bien plus de chômeurs et de précaires que ceux qui sont recensés. Dans ce contexte, les intermittents cherchent donc à signifier que, la solution n’est pas forcément de promettre le CDI pour tout le monde mais de penser des droits nouveaux pour tous les salariés à l’emploi discontinu.

« La mobilité se situe uniquement dans le champ des revendications patronales, elle est subie par les salariés »

Qu’entendez-vous par « emploi discontinu » ?

Le combat des intermittents incite à nous interroger sur la sacralisation du plein-emploi que notre inconscient collectif a érigé en horizon ultime. Quand le candidat Hollande dit « le plein-emploi à tout prix », on peut se demander sur ce qu’il entend par « à tout prix ». Au mieux, il s’agit d’une promesse pour demain. Les intermittents bénéficient aujourd’hui d’un modèle progressiste basé sur un emploi discontinu, mais avec un salaire qui, lui, est continu. En défendant leur régime d’indemnisation, les intermittents n’ont cessé de se battre pour que l’instabilité de leur emploi ne signifie pas précarité de leurs revenus et de leur protection sociale. Ce modèle de droits étendus est une esquisse pour repenser les droits au salaire continu pour tous les salariés. Il porte des valeurs émancipatrices, y compris pour les salariés permanents.

En quoi ces salaries permanents sont-ils concernés ?

Eux aussi vivent avec l’épée de Damoclès du chômage. Le fait d’avoir un autre horizon que celui bloqué par la falaise de la précarité, leur permettrait de changer le rapport de forces avec le patronat. La contrainte de la subordination serait desserrée ainsi que la peur des aléas du marché du travail. Aujourd’hui, la mobilité se situe uniquement dans le champ des revendications du camp patronal, elle est subie par les salariés. Si elle était sécurisée, la mobilité pourrait être choisie. Cette lutte concerne donc tous les salariés dont les droits sont constitués depuis 1945 sur l’idée d’emploi stable. La question est donc de réadapter l’ambition des fondateurs de la Sécurité sociale et du Conseil national de la résistance. En continuant à inventer de nouveaux droits de manière offensive, la lutte des intermittents est une leçon pour l’ensemble du salariat.

Les luttes menées au début de l’été ont découlé sur une série de réunions de concertation entre trois médiateurs du gouvernement, les coordinations des intermittents, les syndicats, le patronat et des observateurs, comme vous. Peut-on considérer que le dialogue est rouvert ?

Le premier ministre a mandaté les trois sages pour mener la concertation : Combrexelles, Archambault et Gille. Il leur a demandé de faire des propositions au plus tard en décembre. L’idée affichée est de trouver une solution pérenne à cette question des annexes 8 et 10. Ces trois sages consultent, ils se feront l’écho des consensus qui pourraient se dessiner, et j’espère qu’ils ne s’interdiront pas de faire des propositions. Pour la première fois, les organisations dites représentatives à l’Unedic ont accepté de dialoguer avec d’autres organisations non représentatives juridiquement, mais qui politiquement ont un poids réel. Il s’agit à la fois d’employeurs du spectacle qui refusent d’entrer au Medef, d’organisations syndicales comme l’Unsa et de la Coordination des Intermittents et précaires. La CGT était là bien évidemment.

« Dire « Ce qu’il faut, c’est des CDI pour tous », c’est le degré zéro de la réflexion sur l’intermittence et de l’invention de nouveaux droits pour tous les salariés »

Ces rencontres reprendront le 18 septembre, jusqu’en décembre. Sur quoi peuvent-elles déboucher concrètement ?

Aujourd’hui, j’avoue que ce processus me semble indéterminé. À chaque grand mouvement des intermittents, en 2008, en 2003, une fois que les accords ont été signés, il y a eu des moments de consultation de ce type. En 2004, le rapport Guillot avait déjà mobilisé tout le monde. Est-ce que des solutions pérennes seront trouvées d’ici au mois de décembre pour consolider la notion d’emploi discontinu ? L’histoire nous le dira. Personne ne sait où nous allons, ni si nous allons déboucher sur quelque chose. J’espère que nous n’accoucherons pas d’une souris.

Il est difficile d’imaginer que le Medef et la Coordination des intermittents puissent dialoguer…

Nous avons commencé par aborder les questions qui ne fâchent pas et à élaborer des éléments de langage communs. Le jeu de la Coordination des intermittents et précaires et de la CGT est d’élargir le débat sur la question de l’emploi discontinu. Cela provoque des malentendus dans la mesure où le Medef et la CFDT ne veulent même pas discuter des annexes 8 et 10 puisqu’ils ont trouvé un accord entre eux deux. Donc parler plus largement du salariat, ce n’est pas leur souci. Ils sont là pour discuter de ce que l’État pourrait faire pour les intermittents par ailleurs.

Ces problèmes de définition de l’emploi précaire ou discontinu semblent centraux, et significatifs de profondes divergences dans les façons de les aborder…

Un leitmotiv m’a frappé dans les discussions : l’intermittence en elle-même serait un problème et la seule solution serait la permanence. Je ne parle pas de la CGT ni de la Coordination. Lors de la séance sur la précarité, il n’a été question que de cédéisation de ceux qu’on appelle les permittents. Il s’agit des intermittents qui n’ont qu’un employeur pour lequel ils travaillent toute l’année. Le cas qui revient tout le temps est celui de la production audiovisuelle de flux (les séries, les émissions récurrentes, etc). Là où, a priori, il existe une continuité dans la production. Ce n’est pas le cas du cinéma. Chaque film est produit de manière singulière ; à la fin d’une production, on dira toujours aux intermittents : « Merci et au revoir ». Les employeurs discutent de structuration de l’emploi dans les branches. Mais ceux qu’on désigne comme précaires chez les intermittents, ce sont ceux qui ont du mal à faire leurs 507 heures et qui alternent entre l’intermittence et le RSA. FO a une position encore plus radicale. Il propose de se battre contre l’intermittence et dit : ce qu’il faut c’est des CDI pour tous. Pour moi, c’est le degré zéro de la réflexion sur l’intermittence et de l’invention de nouveaux droits pour tous les salariés.

Que pensez-vous de la nomination de Fleur Pellerin ?

Rien. Tout est à recommencer. J’avais le sentiment qu’au moins, sur le terrain des idées, du diagnostic, de la compréhension de ce qu’il se passait avec les intermittents, mais aussi sur le fait que les réformateurs de l’assurance-chômage avaient véhiculé un grand nombre d’idées fausses dans les médias, c’était un peu gagné avec Aurélie Filippetti. Avec Michel Sapin également. Il avait enfin expliqué devant les députés que le déficit de l’Unedic n’existait pas et que c’était bien une vue de l’esprit. Je ne sais pas quelle est la connaissance du dossier de Fleur Pellerin.

partagé par

Jérémie OZOG, COM‘9

 

La Bibi citoyenne du 06 vous recommande: Karl Marx à Pékin

Une merveilleuse analyse qui repose des bases saines pour comprendre tant la Chine actuelle, que ce qui se joue dans l’idéologie capitaliste financière dominante actuelle.
Cette analyse percutante permet de quitter toutes les postures béates et admiratives, ou les postures de défiance vis à vis de la Chine et de son Capitalisme dual méconnu ou incompris (co-existence d’un mode de production « asiatique » non capitaliste, avec un mode de production capitaliste).
Il y est d’ailleurs rappelé avec justesse, et faits à l’appui, que la Chine n’a jamais été, ni de prés ni de loin, ni socialiste, ni communiste (ne pas confondre le nom sur la boite, et la pub qui l’entoure, avec le contenu réel!).
Ce livre éclaire également sur les crises qui menacent cet empire né dans la périphérie du capitalisme et probablement en passe d’y rester/retourner…

Chaudement recommandé, particulièrement aux béats de la finance et du néo-libéralisme.

Ci-joint une conférence de la Damoiselle à la Sorbonne: http://vimeo.com/54225605


Photo : Une merveilleuse analyse qui repose des bases saines pour comprendre tant la Chine actuelle, que ce qui se joue dans l'idéologie capitaliste financière dominante actuelle.<br /><br />
Cette analyse percutante permet de quitter toutes les postures béates et admiratives, ou les postures de défiance vis à vis de la Chine et de son Capitalisme dual méconnu ou incompris (co-existence d'un mode de production "asiatique" non capitaliste, avec un mode de production capitaliste).<br /><br />
Il y est d’ailleurs rappelé avec justesse, et faits à l'appui, que la Chine n'a jamais été, ni de prés ni de loin, ni socialiste, ni communiste (ne pas confondre le nom sur la boite, et la pub qui l'entoure, avec le contenu réel!).<br /><br />
Ce livre éclaire également sur les crises qui menacent cet empire né dans la périphérie du capitalisme et probablement en passe d'y rester/retourner...<br /><br />
Chaudement recommandé, particulièrement aux béats de la finance et du néo-libéralisme.

éditeur: Démopolis (je précise car on ne le voit pas bien sur la couverture)

Prix :23€

 

Fraternellement,

Jérémie OZOG Com’9, Librairie et formation (oh le cumulard !)

Un texte essentiel sur…: L’ARGENT

Un texte essentiel sur…:

L’ARGENT

 

L’argent, qui possède la qualité de pouvoir tout acheter et de s’approprier tous les objets, est par conséquent l’objet dont la possession est la plus éminente de toutes. Universalité de sa qualité est la toute-puissance de son être ; il est donc considéré comme l’être tout-puissant. L’argent est l’entremetteur entre le besoin et l’objet, entre la vie et le moyen de vivre de l’homme. Mais ce qui me sert de médiateur pour ma propre vie me sert également de médiateur pour l’existence d’autrui. Mon prochain, c’est l’argent.
Shakespeare dans Timon d’Athènes :

« De l’or! De l’or jaune, étincelant, précieux ! Non, dieux du ciel, je ne suis pas un soupirant frivole… Ce peu d’or suffirait à rendre blanc le noir, beau le laid, juste l’injuste, noble l’infâme, jeune le vieux, vaillant le lâche… Cet or écartera de vos autels vos prêtres et vos serviteurs; il arrachera l’oreiller de dessous la tête des mourants; cet esclave jaune garantira et rompra les serments, bénira les maudits, fera adorer la lèpre livide, donnera aux voleurs place, titre, hommage et louange sur le banc des sénateurs; c’est lui qui pousse à se remarier la veuve éplorée. Celle qui ferait lever la gorge à un hôpital de plaies hideuses, l’or l’embaume, la parfume, en fait de nouveau un jour d’avril. Allons, métal maudit, putain commune à toute l’humanité, toi qui mets la discorde parmi la foule des nations… « Shakespeare peint magistralement l’argent.

Ce que je peux m’approprier grâce à l’argent, ce que je peux payer, autrement dit ce que l’argent peut acheter, je le suis moi-même, moi le possesseur de l’argent. Les qualités de l’argent sont mes qualités et mes forces essentielles en tant que possesseur d’argent. Ce que je suis et ce que je puis, ce n’est nullement mon individualité qui en décide. Je suis laid, mais je puis m’acheter la femme la plus belle. Je ne suis pas laid, car l’effet de la laideur, sa force repoussante est annulée par l’argent. Personnellement je suis paralytique mais l’argent me procure vingt-quatre pattes ; je ne suis donc pas paralytique. Je suis méchant, malhonnête, dépourvu de scrupules, sans esprit, mais l’argent est vénéré, aussi le suis-je de même, moi, son possesseur. L’argent est le bien suprême, donc son possesseur est bon ; au surplus, l’argent m’évite la peine d’être malhonnête et l’on me présume honnête. Je n’ai pas d’esprit, mais l’argent étant l’esprit réel de toute chose, comment son possesseur manquerait-il d’esprit ? Il peut en outre s’acheter les gens d’esprit, et celui qui est le maître des gens d’esprit n’est-il pas plus spirituel que l’homme d’esprit ? Moi qui puis avoir, grâce à l’argent, tout ce que désire un cœur humain, ne suis-je pas en possession de toutes les facultés humaines ? Mon argent ne transforme-t-il pas toutes mes impuissances en leur contraire ?
Si l’argent est le lien qui me relie à la vie humaine, à la société, à la nature et aux hommes, l’argent n’est-il pas le lien de tous les liens ? Ne peut-il pas nouer et dénouer tous les liens ?
Shakespeare fait ressortir surtout deux propriétés de l’argent : C’est la divinité visible, la métamorphose de toutes les qualités humaines et naturelles en leur contraire, la confusion et la perversion universelles des choses. L’argent concilie les incompatibilités. C’est la prostituée universelle, l’entremetteuse générale des hommes et des peuples.

Marx, Manuscrits de 1844

NB: vous pouvez retrouver gratuitement l’intégral du texte des manuscrits de 1844 et bien plus sur le site http://www.marxists.org/francais/marx/works.htm

Frédéric LORDON – BNP-Paribas, une affaire de géométries variables

mardi 8 juillet 2014, par Frédéric Lordon

On peut bien, si l’on veut, reparcourir l’affaire BNP-Paribas à la lumière de la saga crapuleuse des banques à l’époque de la libéralisation financière. Il faut bien admettre, en effet, que la série a de quoi impressionner, et jusqu’au point de vue défendu depuis le début ici-même, qui tient plutôt la ligne de ne pas céder à la diversion fait-diversière pour maintenir les droits de l’analyse, telle qu’elle doit rendre compte des crises financières non par l’« hypothèse du mal » — Madoff, Kerviel ou qui l’on voudra —, mais par les fonctionnements structuraux, réguliers, intrinsèques, des marchés de capitaux déréglementés. Dans un élan de sensationnalisme irrépressible autant qu’irréfléchi, les médias, toujours pressés de se rendre au plus gros, et au plus bête, se jettent sur tous les délinquants à chemise rayée comme sur des providences — il est vrai que les occasions sont rares de rafler simultanément les bénéfices de la colère populaire, de la belle image du perp walk [1] des puissants — manière d’attester une souveraine indépendance d’avec les « élites » —, et de la critique de la finance. Mais qui ne critique rien.

La fraude comme business model bancaire ?

Car il est bien certain qu’un défilé de traders en combi orange et cadènes aux poignets ne dira jamais rien d’intéressant sur la finance. Obnubilation — par l’image —, et oblitération — de tous les mécanismes ordinaires de la finance —, sont donc les produits les plus certains du barnum systématiquement monté par les médias sur les « grandes affaires » dûment étiquetées « en col blanc ». Prendre la mesure de l’inanité analytique du point de vue criminologique-médiatique requiert, par exemple, de se livrer à une simple expérience de pensée contrefactuelle demandant si la crise financière aurait été évitée si Monsieur Madoff-père s’était retiré ou si Jérôme Kerviel avait fait un BEP de plombier-chauffagiste — bref si les fâcheux n’avaient pas été là. Sauf passion du bouc émissaire et paranoïa en roue libre, la réponse est évidemment non, et les individus délinquants par conséquent renvoyés à leur juste statut : même pas épiphénoménal, simplement secondaire.

Il s’ensuit surtout que comprendre, et puis prévenir, les crises financières exige un peu plus qu’un programme de redressement moral des traders : s’intéresser aux structures mêmes des marchés de capitaux et des institutions bancaires, telles que, dans leur fonctionnement nominal, elles produisent immanquablement ces séquences : surtension spéculative mimétique, renversement brutal des anticipations, crise de liquidité se propageant de proche en proche, pour gagner potentiellement tous les compartiments de marché par le jeu de la course à la réalisation de détresse [2] et de la ruée au cash [3].

Le fait-divers divertit, donc, mais il faut bien avouer qu’au rayon « banque et finance » la récurrence fait-diversière commence à impressionner. Entre Goldman Sachs (spéculation contre ses propres clients), HSBC (blanchiment d’argent, fraude fiscale), Crédit Suisse (fraude fiscale), Barclays (manipulation du Libor), RBS (Libor également), et l’on en passe, la généralisation des comportements crapuleux finirait presque par faire croire à l’existence non pas de simples déviations récurrentes, idée en soi tendanciellement oxymorique, mais à un véritable business model, où une partie du dégagement de profit est très délibérément remise à l’exploitation de situations frauduleuses. Champion bancaire national, mais fier de sa surface globalisée, il n’était que justice — ou bien nécessité — que BNP-Paribas vînt ajouter son nom à ce très illustre palmarès. Six milliards et demi de prune tout de même — il va y avoir du bain de siège au conseil d’administration.

Pertes normales, pertes intolérables

On peut cependant résister à la pente « délictuelle » et considérer l’affaire BNP-Paribas sous un autre angle. Et même deux.

Le premier interroge la perception extrêmement variable que prennent les entités capitalistes de leurs pertes selon leurs origines. Car il y a bien quelque chose comme une hiérarchie dans l’acceptabilité, ou la « normalité », des pertes, dont le sommet est évidemment occupé par les « pertes de marché », verdict incontestable d’une quasi-nature à laquelle il est à peu près aussi vain d’objecter que de demander une diminution de l’accélération de la pesanteur. On notera au passage que les « pertes de marché » sont assez souvent l’effet de spectaculaires conneries des équipes dirigeantes, mauvais choix d’investissement ou management déplorable — on pense ainsi, mais comme un exemple parmi tant d’autres, à Boeing qui, à la fin des années 1990, avait cru malin de céder à la mode du downsizing et avait largement licencié, pour se trouver confronté à peine quelques années plus tard à un retour de croissance… et devoir ré-embaucher en catastrophe, mais en s’apercevant que tous les salariés précédemment virés étaient porteurs d’une longue et irremplaçable expérience, et qu’il allait falloir consentir longtemps des coûts monumentaux d’apprentissage, de sous-productivité, et de sous-qualité [4]. Et l’on tiendra pour l’un des symptômes les plus caractéristiques du néolibéralisme qu’on y fustige sans cesse « l’incurie de l’Etat », quand celle du capital engage des sommes non moins considérables, et aussi le destin direct de salariés qui payent de leurs emplois perdus ou de leurs revenus amputés — mais les élites privées de la globalisation, à l’image du « marché », ont été déclarées par principe les insoupçonnables instances de la rationalité, en fait les seules [5].

Or les « élites » économiques sont plus souvent qu’à leur tour à la ramasse, quand elles ne sont pas carrément incapables de comprendre ce qui se passe vraiment dans leurs entreprises, cas d’incompétence spécialement spectaculaires dans le secteur bancaire, comme l’a prouvé la crise des subprimes — des présidents ventripotents, façon Daniel Bouton, n’ayant pas la moindre idée de la tambouille qui se réchauffe dans leurs propres salles de marché [6], ni des risques réels dont ils laissent se charger leurs bilans. Il en est résulté des pertes consolidées pour le système bancaire international dont le FMI avait tenté l’estimation – entre 2 000 et 3 000 milliards de dollars, soit tout de même le plus imposant bouillon de toute l’histoire du capitalisme —, de sorte que « l’élite » s’est révélée nuisance aux intérêts de ses propres mandataires, pour ne rien dire de ceux de la société tout entière.

Rien de cet exploit retentissant cependant n’a conduit à la moindre remise en question de la compétence générale des banquiers néolibéraux à diriger les banques, et pas davantage à chuchoter à l’oreille des gouvernements, deuxième compétence supposément adossée à la première. Rien non plus n’a perturbé le moins du monde le gros mouvement de glotte qu’a nécessité tout de même d’avaler pertes aussi astronomiques, elles également versées au registre de la loi naturelle du marché contre laquelle il n’y a rien à dire.

Ainsi lorsque « le marché » lui impose la sanction, fut-elle colossale, de sa propre incompétence, le capital ne moufte pas. Mais qu’on vienne lui arracher 0,1% de cotisation supplémentaire et il hurle à la mort. Car voilà le bas, le tout en bas, de la hiérarchie de l’acceptabilité des pertes, et en l’occurrence simplement des coûts : ceux qui sont imposés par l’Etat. Procédé décidément d’une puissance heuristique incomparable, il faut là encore se livrer à une expérience de pensée contrefactuelle pour en prendre la mesure, par exemple en partant du montant de l’amende à payer par BNP-Paribas, 6,5 milliards d’euros, en considérant ensuite de celui de son impôt sur les sociétés de 2013, 2,5 milliards d’euros, pour mettre l’un en rapport avec l’autre. Et puis imaginer ceci : un gouvernement de gauche est élu et dit : « la responsabilité des banques privées dans la crise de 2007-2008, dans la récession et les déficits publics qui s’en sont suivis, étant manifeste et incontestable, elles s’acquitteront de la dette qu’elles ont contractée envers la société par une contribution exceptionnelle que nous fixons à trois fois (2,6 fois…) leur dernier impôt payé ». A ce moment ouvrir les micros et bien enregistrer le concert : Michel Pébereau hurle à la mise à mort d’un champion national, Pierre Gattaz déclare l’assassinat de l’esprit d’entreprise, Nicolas Baverez annonce la phase finale du déclin, Bernard Guetta bafouille que nous tournons le dos à l’Union européenne, les Pigeons menacent d’un exode définitif de tous les cerveaux entreprenants, Franz-Olivier Giesbert déclare qu’il faut crever l’Etat obèse, Christophe Barbier que le mur de Berlin a été remonté dans la nuit et que nous nous réveillons du mauvais côté, Jean-Marie Le Guen que trente ans de conversion de la gauche à l’économie de marché viennent d’être rayés d’un trait de plume, Laurent Joffrin pas mieux, etc. Et pourtant, rafler d’un coup trois fois l’impôt annuel, soit à peu de choses près la totalité de son profit, d’un des plus grands groupes mondiaux, les Etats-Unis l’ont fait, et sans un battement de cil.

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Puissance publique et puissances privées :
la possibilité d’un rapport de force

Lire Ibrahim Warde, « Les Etats-Unis mettent les banques à l’amende », Le Monde diplomatique, juillet 2014.Pays du marxisme-léninisme, comme il est connu de soi, les Etats-Unis ont pris un gros bâton et poum. Disons tout de suite qu’il n’y a pas lieu de pousser des cris d’enthousiasme pour autant. La re-régulation des marchés et des institutions bancaires y est aussi en carafe que partout ailleurs, et pour les mêmes raisons que partout ailleurs — l’infestation de la vie politique et des pouvoirs publics par le lobby financier. Aussi le traitement judiciaire à grand spectacle, par amendes faramineuses interposées, n’est-il que le symptôme de cette impuissance mêlée de mauvais vouloir. Mais au moins y a-t-il quelque chose plutôt que rien. Et même en l’occurrence quelque chose assortie d’assez bonnes propriétés révélatrices. La première tient donc à l’aperception des jugements extraordinairement contrastés auxquels peuvent donner lieu les mêmes événements comptables, selon qu’ils sont le fait de la crasse incurie managériale elle-même — rebaptisée « le marché » —, de la pénalité judiciaire — quand elle est étasunienne —, ou du prélèvement fiscal, pourtant légitime.

La deuxième propriété révélatrice joue formellement d’un semblable effet de contraste, toujours par la simple comparaison avec les Etats-Unis soviétiques d’Amérique, en remettant d’équerre la nature des rapports, et notamment des rapports de force possibles, entre la puissance publique et les puissances privées du capital. Là encore pour s’en apercevoir, il faut imaginer pareille sanction infligée par la justice ou quelque pouvoir réglementaire français à une très grande entreprise, à plus forte raison étrangère, pour entendre, sans le moindre doute possible, les discours de l’attractivité, ou plutôt de la répulsivité du territoire français, la fuite annoncée des « investisseurs », le devenir nord-coréen du pays. Car il est maintenant reçu comme une évidence que les puissances publiques doivent abdiquer toute velléité de souveraineté, qu’elles ne sont finalement que les ancillaires des seules puissances qui comptent vraiment, les puissances du capital.

Par un renversement caractéristique de la pensée économiciste, le néolibéralisme a mis cul par-dessus tête les rapports de souveraineté réels, pour finir par ancrer dans les esprits que l’état normal du monde consiste en ce que le capital règne et que la puissance publique est serve : elle n’a pas d’autre fonction, et en fait pas d’autre vocation, que de satisfaire ses desideratas. Assez logiquement, en pareille configuration, la liste de ces derniers ne connaît plus de limite, et ceci d’autant plus que, encouragé par le spectacle des Etats se roulant à ses pieds, le capital se croit désormais tout permis.

Affirmation ou démission

Par ce paradoxe bien connu qu’on pourrait nommer « le zèle du converti de fraîche date », c’est probablement en France que cet état des choses fait les plus visibles ravages et, paradoxe dans le paradoxe, à « gauche », on veut dire à la nouvelle droite, où le devoir d’expiation s’élève pour ainsi dire au carré. Que la volonté politique puisse prévaloir contre le marché, qu’elle ne se borne pas à simplement ratifier ses injonctions, qu’elle puisse même avoir l’ambition d’arraisonner les puissances d’argent, ce sont des idées désormais jugées si épouvantables qu’on est coupable de les avoir seulement considérées. Et ce rachat-là est interminable, à proportion de la croyance antérieure, qu’il ne suffit pas de récuser comme une simple erreur mais dont il faut reconnaître, et puis compenser rétroactivement, l’exceptionnelle abomination. Aussi depuis les 3% maastrichtiens de Bérégovoy jusqu’au « pacte de responsabilité », la Gauche repentie, par là vouée à devenir Droite complexée, n’en finit pas de se couvrir la tête de cendre, dans une surenchère de démonstration qui veut prouver à la face du monde l’irréversibilité de sa conversion — et le Medef a très bien compris qu’il pouvait compter sur elle pour en faire plus que n’importe qui.

Notamment, donc, pour se faire la stricte desservante de l’idée néolibérale par excellence qui pose la souveraineté de « l’économie » — et la subordination à elle de tout ce qui n’est pas elle. Ainsi, par exemple, est-il devenu presque impossible de faire entendre qu’il n’y a rien d’anormal à ce qu’une entreprise de service public soit déficitaire, et endettée, précisément parce que les servitudes de sa fonction, l’universalité par exemple, emportent des coûts spécifiques qui l’exonèrent des logiques ordinaires de l’économie privée.

L’Etat est donc désormais enjoint d’abandonner toute logique propre pour n’être plus, fondamentalement, que le domestique de « l’attractivité du territoire », entreprise de racolage désespérée, car la concurrence est sans merci sur les trottoirs de la mondialisation, d’ailleurs dirigée aussi bien vers l’extérieur — faire « monter » les investisseurs étrangers — que, sur un mode plus angoissé encore, vers l’intérieur — retenir à tout prix notre chère substance entrepreneuriale. Il est bien vrai que dans les structures de la mondialisation néolibérale qui lui a ouvert la plus grande latitude possible de déplacements et d’arbitrages stratégiques, le capital a gagné une position de force sans pareille, et la possibilité du chantage permanent : le chantage à la défection, à la fuite et à la grève de l’investissement [7].

Le rapport de force réel cependant ne s’établit pas seulement d’après ses données objectives, mais plus encore peut-être d’après le degré d’amplification que leur font connaître un certain état de soumission et une propension à baisser la tête — à leur maximum dans le cas de la Droite complexée. Si le cas BNP-Paribas, donc, est bien une affaire de géométrie variable, c’est parce qu’en plus de montrer les variations auxquelles peuvent donner lieu les « jugements de pertes », il met en évidence, par la comparaison la plus irrécusable — celle avec les Etats-Unis —, la différence dans les degrés de fermeté, ou d’abdication, des puissances souveraines face aux puissances privées du capital.

Là où l’Etat de François Holande s’humilie chaque jour davantage devant le patronat français, l’administration étasunienne, à qui on peut reprocher bien des choses mais certainement pas de méconnaître ses propres prérogatives de souveraineté, sait de temps en temps rappeler aux entreprises les plus puissantes à qui vraiment revient le dernier mot en politique. En ces occasions — évidemment exceptionnelles, car on présenterait difficilement les Etats-Unis comme le lieu sur Terre du combat contre le capital… —, en ces occasions donc, le gouvernement US se moque comme de son premier décret des possibles cris d’orfraie, de la comédie de l’Entreprise outragée, de la menace du déménagement et de la porte claquée. Etonnamment d’ailleurs, de cris d’orfraie, il n’y a point. BNP-Paribas s’est fait copieusement botter le train, mais BNP-Paribas s’écrase, relit de près Rika Zaraï, fait des frais d’herboristerie… et n’attend, en se faisant petit, que le moment d’avoir le droit de faire retour à ses chères opérations dollars. BNP-Paribas pourrait bien monter sur ses grands chevaux et promettre le boycott des Etats-Unis, les Etats-Unis s’en foutent comme de l’an quarante, et ils s’en foutraient même si ça leur coûtait. Car il s’agit d’affirmer un primat.

 

Ne plus se rouler au pied du capital

Que les raisons diplomatiques qui ont commandé en dernière instance la décision étasunienne soient les plus critiquables du monde, la chose n’est pas douteuse, mais ça n’est pas là qu’est le problème en l’occurrence. Le problème est de principe, et tient à la réaffirmation de la hiérarchie des puissances. Il n’y a certainement pas que des motifs de réjouissance dans l’affirmation de l’imperium étatique, dont on sait à quel point il peut se faire haïssable, le cas des Etats-Unis étant d’ailleurs spécialement gratiné sous ce rapport. Mais s’il n’y a à choisir qu’entre l’imperium de l’Etat et celui du capital, alors la décision est vite faite. Pour toutes ses distorsions et ses pantomimes, il arrive que la chose appelée (par charité) « démocratie », dans le cadre de laquelle l’imperium d’Etat est contraint de s’exercer, il arrive donc, parfois, que la « démocratie » impose des commencements de régulation, voire laisse passer quelque chose de la voix populaire si celle-ci finit par le dire suffisamment fort. Dans l’espace du capital, en revanche, nul ne vous entendra crier.

S’il s’agit de capitalisme, tout ce qui vient des Etats-Unis est réputé insoupçonnable, répète en boucle le catéchisme néolibéral. Pour une fois profitons-en. Les occasions de faire jouer en notre faveur les fausses hiérarchies de la légitimité sont trop rares pour ne pas être exploitées jusqu’au trognon. S’il y a bien une leçon à tirer de l’affaire BNP-Paribas, ça n’est pas tant que les banquiers néolibéraux sont des fripouilles, aussi bien au sens du code pénal que de la nuisance sociale, c’est que la puissance publique, pourvu qu’elle le veuille, n’a ni à passer sous le tapis ni à céder à tous les ultimatums du capital. La vérité c’est que les capitalistes sont assez souvent de grosses nullités ; qu’on ne compte plus les désastres privés comme publics auxquels ils ont présidé ; que leur départ outragé aurait assez souvent moins d’une catastrophe que d’un opportun débarras ; qu’il ne manque pas de gens, derrière, pour prendre leur place — et pourquoi pas sous les formes post-capitalistes de la récommune [8] ; que si c’est le capital local lui-même qui fait mine de s’en aller, il y a d’abord quelques moyens juridiques très simples de l’en empêcher ; que si c’est le capital étranger qui menace de ne plus venir, il n’y a pas trop de mouron à se faire pourvu qu’on n’appartienne pas à la catégorie des eunuques « socialistes » : la rapacité du capital sait très bien s’accommoder même des conditions les plus « défavorables » — le cas BNP-Paribas ne démontre-t-il pas précisément qu’on fait la traque aux entreprises qui se précipitent, mais clandestinement, pour faire des affaires en Iran, au Soudan, etc., pays pas spécialement connus pour leurs ambiances business friendly

S’il y a un sou de profit à faire plutôt que zéro, le capital ira [9]. Et si, d’aventure, offensé, il prend ses grands airs un moment, il reviendra. L’éternel retour de la cupidité, ne sont-ce d’ailleurs pas les marchés financiers qui en font le mieux la démonstration : là où la théorie économique vaticine, le doigt tremblant, qu’un défaut sur la dette souveraine « ferme à tout jamais les portes du marché », l’expérience montre que les Etats ayant fait défaut font surtout… leur retour sur le marché à quelques années d’écart à peine, et qu’ils sont bien certains de trouver à nouveau des investisseurs pour leur prêter, d’autant plus si les taux sont un peu juteux.

Sagesse du (très) gros bâton,
exemplarité de la saisie

Que la puissance publique ait ainsi les moyens de réaffirmer le primat de la souveraineté politique et de tendre le rapport de force avec le capital, comme l’atteste spectaculairement la décision des Etats-Unis contre BNP-Paribas, mais contre bien d’autres groupes, étrangers ou pas, bancaires comme industriels, c’est un aspect du dossier qui, curieusement, n’a pas traversé l’esprit d’un seul éditorialiste. On se souvient en revanche de la tempête d’indignation qu’avait soulevée la nationalisation par le gouvernement argentin de YPF, filiale du groupe pétrolier espagnol Repsol. N’étaient-ce pas les lois du marché, peut-être même les droits sacrés de la propriété, qui étaient ainsi foulés au pied ? Indépendamment de toute discussion du bien-fondé de la décision économique en soi, qui est sans pertinence pour le présent propos, on rappellera tout de même que cette nationalisation s’est faite dans les règles, par rachat monétaire de leurs titres aux actionnaires — le droit de propriété n’a donc pas trop souffert. Il n’y a d’ailleurs aucune raison pour qu’il en aille toujours ainsi. Il est des cas où la violation de bien public est telle que la saisie pure et simple est une solution d’une entière légitimité politique — c’est bien ce qu’il aurait fallu infliger au secteur bancaire privé dans sa totalité, responsable de la plus grande crise financière et économique de l’histoire du capitalisme [10].

Il faut rappeler ces choses élémentaires pour prendre à nouveau la mesure des pouvoirs réels de la puissance souveraine, contre tous les abandons des démissionnaires — vendus ou intoxiqués. Et l’occasion est ainsi donnée d’offrir au paraît-il insoluble problème de la re-régulation financière sa solution simple, simple comme le « dénouement » du nœud gordien, une solution en coup de sabre : les règles — c’est-à-dire les interdictions — de la nouvelle régulation posées [11], toute infraction sérieuse sera aussitôt sanctionnée par une nationalisation-saisie, soit une expropriation sans indemnité aucune des actionnaires.

Comme l’a définitivement montré la crise ouverte depuis 2007, crise généreusement passée par la finance privée aux finances publiques et à l’économie réelle, et qui s’est payée en millions d’emplois perdus, en revenus amputés et en innombrables vies détruites, la position occupée par le système bancaire dans la structure sociale d’ensemble du capitalisme le met ipso facto en position de preneur d’otages — à laquelle la théorie économique, bien propre sur elle, préfère le nom plus convenable d’« aléa moral » —, et par là même en position d’engendrer impunément, et répétitivement, des dégâts sociaux hors de proportion. La tolérance en cette position névralgique d’un secteur privé, abandonné à la cupidité actionnariale, ne peut avoir moindre contrepartie que la reconnaissance de la très haute responsabilité sociale des banques qui s’ensuit, assortie des sanctions les plus draconiennes en cas de manquement, la saisie-nationalisation en étant la plus naturelle — position en réalité d’une grande, d’une coupable, tolérance, car la conclusion qui suit logiquement de pareille analyse voudrait plutôt que, par principe, le système bancaire soit d’emblée, et en totalité, déprivatisé [12].

En tout cas, comme le montre à sa manière l’affaire BNP-Paribas, et le profil bas aussitôt adopté par ses dirigeants, le rapport de force a ses éminentes vertus, le seul moyen de faire plier une puissance, comme celle du capital, étant de lui opposer une puissance contraire et supérieure. Il suffit donc de sortir les contondants de taille suffisante pour (re)découvrir que le capital n’est pas souverain, et qu’il peut être amené à résipiscence. Gageons que les conseils d’administration bancaires, dûment informés du nouveau « contexte régulateur » qu’on se propose de leur appliquer, ne manqueraient pas — désormais — de surveiller avec un peu moins de laxisme, peut-être même de très près, les agissements des directions qui sont en fait leurs mandataires. Et que, sous la menace d’une expropriation sans frais, ils se montreraient des plus attentifs au respect par leur banque des nouvelles règles en vigueur.

Le capital, dit-on, s’y entend comme personne pour trouver les défauts de la cuirasse, tourner les réglementations et faire fuir tous les contrôles. A leur corps défendant sans doute, les Etats-Unis viennent de prouver que non, en montrant en acte qu’il suffit de taper suffisamment fort pour que le capital se tienne tranquille. Nul ne sera assez égaré pour voir dans cette décision à l’encontre de BNP-Paribas autre chose qu’une de ces éruptions réactionnelles de souveraineté étatique [13] sans suite ni cohérence, en tout cas sans le moindre projet politique d’ensemble. Mais peu importe : la démonstration est là, il appartient ensuite à qui voudra de la prolonger en un projet, le projet que le capital ne soit plus le souverain dans la société, le projet d’une déposition en somme.

Notes

[1] Perpetrator walk, ou perp walk, est le nom donné à l’exhibition médiatique des accusés, menottes aux poignets, encadrés par deux policiers.

[2] C’est-à-dire la vente en panique des actifs vendables.

[3] Voir à ce sujet André Orléan, Le Pouvoir de la finance, Odile Jacob, 1999, et De l’euphorie à la panique. Penser la crise financière, Editions Rue d’Ulm, 2009 ; ainsi que Frédéric Lordon, Jusqu’à quand ? Pour en finir avec les crises financières, Raisons d’agir, 2008.

[4] On trouvera un catalogue d’erreurs managériales bien fourni dans l’ouvrage de Christian Morel, Les Décisions absurdes, Gallimard, 2009.

[5] De ce point de vue le numéro de Marianne en date du 19 juin 2014 qui pose la question « Les grands patrons français sont-ils nuls ? » tranche agréablement.

[6] Ce qui ne veut certainement pas dire en l’occurrence que Kerviel était seul au monde, l’hypothèse que nul dans sa hiérarchie n’ait rien connu de ses agissements étant proprement rocambolesque.

[7] Au sujet des prises d’otages du capital voir « Les entreprises ne créent pas l’emploi », 26 février 2014.

[8] Sur l’idée de « récommune », voir Frédéric Lordon, La crise de trop, Fayard, 2009 ; Capitalisme, désir et servitude. Marx et Spinoza, La Fabrique, 2010.

[9] En ces temps de capitalisme actionnarial, la formulation la plus juste dirait : « s’il y a une opportunité de passer la barre de la rentabilité financière d’un sou plutôt que de zéro… »

[10] Voir « Pour un système socialisé du crédit », 5 janvier 2009.

[11] Dont on pourra trouver les éléments dans « Si le G20 voulait… », septembre 2009.

[12] Voir « Pour un système socialisé du crédit », 5 janvier 2009.

[13] Qu’on nous épargne les distinctions en l’occurrence byzantines entre « l’Etat », stricto sensu, et « la Justice ». Ce qui compte ici c’est la puissance publique lato sensu, en tant qu’elle oppose sa logique propre à celle des puissances privées.

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Jérémie OZOG, COM’9

Droit d’esclavage ou droit de grève ? Choisissez votre camp…

« Pour dénoncer l' »esclavagisme pratiqué à bord d’un navire russe, les dockers [finnois] ont refusé de le décharger, ce qui a conduit à des menaces de la compagnie envers un délégué syndicale [!] en réaction 3000 membres du syndicat des transports ont pris part à une grève légale d’une journée […]. Le mouvement à été dénoncé par Mme Tiina HAASPASALO (conseillère politique en chef de la confédération des industries finlandaises) [au motif que ] la grève peut avoir un impact […] sur la relation avec la clientèle des entreprises » !

Cette « collabo » à choisi son camps: plutôt l’esclavage et le marché « contraint et fossoyé » que le respect du droit de grève ! , des droits du travail ! des droits Humains !

Photo

(l’extrait initial provient du Monde Diplomatique de juillet 2014 et du Helsinki Times du 11 juin 2014)

Jérémie OZOG, COM‘9

 

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